Zola, Germinal, la découverte du Voreux, commentaire littéraire
- Le 23/01/2018
- Dans Commentaires EAF, français
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La découverte du « Voreux » (Germinal (1885), Émile Zola )
Alors, l’homme reconnut une fosse. Il fut repris de honte : à quoi bon ? il n’y aurait pas de travail. Au lieu de se diriger vers les bâtiments, il se risqua enfin à gravir le terri sur lequel brûlaient les trois feux de houille, dans des corbeilles de fonte, pour éclairer et réchauffer la besogne. Les ouvriers de la coupe à terre avaient dû travailler tard, on sortait encore les déblais inutiles. Maintenant, il entendait les moulineurs pousser les trains sur les tréteaux, il distinguait des ombres vivantes culbutant les berlines, près de chaque feu.
« Bonjour », dit-il en s’approchant d’une des corbeilles.
Tournant le dos au brasier, le charretier était debout, un vieillard vêtu d’un tricot de laine violette, coiffé d’une casquette en poil de lapin9 ; pendant que son cheval, un gros cheval jaune, attendait, dans une immobilité de pierre, qu’on eût vidé les six berlines montées par lui. Le manœuvre employé au culbuteur, un gaillard roux et efflanqué, ne se pressait guère, pesait sur le levier d’une main endormie. Et, là-haut, le vent redoublait, une bise glaciale, dont les grandes haleines régulières passaient comme des coups de faux.
« Bonjour », répondit le vieux.
Un silence se fit. L'homme, qui se sentait regardé d’un œil méfiant, dit son nom tout de suite.
« Je me nomme Étienne Lantier, je suis machineur... Il n’y a pas de travail ici ? »
Les flammes l’éclairaient, il devait avoir vingt et un ans, très brun, joli homme, l’air fort malgré ses membres menus.
Rassuré, le charretier hochait la tête.
« Du travail pour un machineur, non, non... Il s’en est encore présenté deux hier. Il n’y a rien. »
Une rafale leur coupa la parole. Puis, Étienne demanda, en montrant le tas sombre des constructions, au pied du terri :
« C'est une fosse, n’est-ce pas ? »
Le vieux, cette fois, ne put répondre. Un violent accès de toux l’étranglait. Enfin, il cracha, et son crachat, sur le sol empourpré, laissa une tache noire10.
« Oui, une fosse, le Voreux... Tenez ! le coron est tout près. »
À son tour, de son bras tendu, il désignait dans la nuit le village dont le jeune homme avait deviné les toitures. Mais les six berlines étaient vides, il les suivit sans un claquement de fouet, les jambes raidies par des rhumatismes ; tandis que le gros cheval jaune repartait tout seul, tirait pesamment entre les rails, sous une nouvelle bourrasque, qui lui hérissait le poil.
Le Voreux, à présent, sortait du rêve. Étienne, qui s’oubliait devant le brasier à chauffer ses pauvres mains saignantes, regardait, retrouvait chaque partie de la fosse, le hangar goudronné du criblage, le beffroi du puits, la vaste chambre de la machine d’extraction, la tourelle carrée de la pompe d’épuisement. Cette fosse, tassée au fond d’un creux, avec ses constructions trapues de briques, dressant sa cheminée comme une corne menaçante, lui semblait avoir un air mauvais de bête goulue, accroupie là pour manger le monde. Tout en l’examinant, il songeait à lui, à son existence de vagabond, depuis huit jours qu’il cherchait une place ; il se revoyait dans son atelier du chemin de fer, giflant son chef, chassé de Lille, chassé de partout ; le samedi, il était arrivé à Marchiennes, où l’on disait qu’il y avait du travail, aux Forges ; et rien, ni aux Forges, ni chez Sonneville, il avait dû passer le dimanche caché sous les bois d'un chantier de charronnage11, dont le surveillant venait de l’expulser, à deux heures de la nuit. Rien, plus un sou, pas même une croûte : qu’allait-il faire ainsi par les chemins, sans but, ne sachant seulement où s’abriter contre la bise ? Oui, c’était bien une fosse, les rares lanternes éclairaient le carreau, une porte brusquement ouverte lui avait permis d’entrevoir les foyers des générateurs, dans une clarté vive. Il s’expliquait jusqu’à l’échappement de la pompe, cette respiration grosse et longue, soufflant sans relâche, qui était comme l’haleine engorgée du monstre.
La découverte du « Voreux »
Analyse en questionnaire
Oral EAF de 34 questions réponses
- La découverte du voreux, Zola
- Questionnaire EAF, 34 questions réponses
- Problématique pour l'oral :
- Dans quelle mesure cet extrait est-il conforme aux thèses de Zola sur le naturalisme?
- Plan
- I - Une description focalisée
- II - Un personnage complet :
- III - Du lieu au symbole
Germinal, la découverte du voreux, Zola. Dans quelle mesure cet extrait est-il conforme aux thèses naturalistes de Zola?
- Par prepabac
- Le 28/04/2014
- Dans Les oraux de français
Oral EAF de 34 questions réponses
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