•Une roman doit-il ouvrir les yeux du lecteur ou au contraire lui permettre d'échapper à la réalité?
- Le 20/02/2017
- Dans Dissertations EAF
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Sujet : En conclusion du roman de Guy de Maupassant Une vie, Rosalie déclare : "La vie, voyez-vous, ça n'est jamais si bon ni si mauvais qu'on croit". Pensez-vous qu'un roman ou une pièce de théâtre doit ouvrir les yeux du lecteur ou du spectateur sur la vie, ou bien au contraire, permettre d'échapper à la réalité?
Devoir d'Eléonore F. :
La lecture est, pour certains, un plaisir, pour d’autres, une obligation, c’est en fait avant tout une histoire de point de vue et d’opinion individuelle. De même, certaines personnes vont considérer que la lecture doit "ouvrir les yeux du lecteur sur la vie" alors que d’autres penseront, bien au contraire, qu’elle doit permettre d’échapper à la réalité. La littérature est, en effet, un moyen sûr utilisé pour la critique ou la dénonciation ; cependant le simple plaisir de lire peut prédominer et un roman ou une pièce de théâtre peut avoir comme simple but le rire, le divertissement ou la rêverie. Dans un premier temps, on montrera que la littérature cherche à dénoncer une vérité de la vie. Puis, on verra que le roman et le théâtre peuvent être un échappatoire vers le rêve
Tout d’abord, le genre théâtral et romanesque peut avoir pour but d’ouvrir les yeux du lecteur ou du spectateur. Ainsi, à travers les défauts ou les qualités de certains personnages, l’auteur peut montrer des exemples à ne pas suivre. Cela est visible dans Tartuffe de Molière avec le personnage d’Orgon, un des plus importants, qui est un homme extrêmement crédule et qui se laisse abuser par le fourbe Tartuffe qui s’est introduit chez lui pour lui voler ses biens et sa femme. De même, dans Une Vie de Maupassant, le personnage principal, Jeanne, est un être sans caractère, soumis, qui, du début à la fin, se laisse abuser par tout le monde. Enfin, dans Macbeth, de Shakespeare, le personnage éponyme de cette pièce tombe dans la folie et la misère à cause de son défaut qui est la soif de pouvoir. Ainsi, on peut observer que, avec ces œuvres, les auteurs ouvrent les yeux de leurs lecteurs sur les défauts humains et leurs conséquences.
En outre, l’utilisation de personnages archétypaux et dont le défaut est poussé à son paroxysme ouvre parfois les yeux, notamment, sur une société. Dans la pièce de Molière par exemple, le rôle de dévot que joue Tartuffe, qui est en fait un menteur doublé d’un traître, cherche à dénoncer l’hypocrisie présente dans le monde de l’Eglise à l’époque. De même, dans Une Vie, l’abbé Tolbiac qui est un prêtre fanatique, violent et pervers, montre par sa présence que l’Eglise peut être dangereuse si ses idées sont mal interprétées ou déformées. Ici, ces deux exemples montrent et dénoncent un aspect négatif d’une partie de la société de leur époque.
De surcroît, une œuvre peut dénoncer et ouvrir les yeux des lecteurs à travers la présentation de certaines situations injustes et révoltantes. On observe cela dans Une Vie encore une fois, car lorsque Julien trompe sans retenue son épouse, la frêle Jeanne, celle-ci ne peut que l’accepter car à son époque, les gens considéraient comme normal ce comportement et Julien ne peut donc pas être sanctionné. Par ailleurs, dans Au bonheur des dames, de Zola, le magasin donnant son nom au livre écrase sans aucune pitié les petits commerçants montrant ainsi un étonnant manque d’altruisme et de bon sens ainsi qu’un important bouleversement économique. On en conclut que le théâtre ou le roman cherche parfois à choquer ses lecteurs (ou spectateurs) afin de leur ouvrir les yeux.
Bien que la littérature montre souvent une réalité bien crue, elle permet parallèlement d’y échapper. La comédie et la farce médiévale en sont un parfait exemple puisque leur but est de faire rire le lecteur ou le spectateur. Avec les coups de bâton typiques de la farce dans Les fourberies de Scapin, de Molière, ou Tartuffe avec son comique de répétition dans l’acte 1, scène 4, lorsque Orgon, sans se soucier un seul instant des problèmes de son épouse, demande sans cesse des nouvelles du « pauvre » Tartuffe qui se porte comme un charme, l’auteur cherche a divertir son public.
De même, on peut échapper à la réalité grâce à des histoires d’amour incroyables ou grâce à des épopées fantastiques. Roméo et Juliette, de Shakespeare, en est le parfait exemple puisque cette histoire d’amour, bien que tragique, renverse les cœurs et fait rêver. De même, L’Odyssée, d’Homère, avec le récit de la folle aventure d'Ulysse et des créatures que l'on rencontre tout au long de l'histoire nous plonge dans l’imaginaire et dans un monde fantastique. Dans ces deux cas, le lecteur s’évade et est happé par l’histoire si bien qu’il peut en oublier sa réalité.
Enfin, un bon auteur peut faire rêver le lecteur ou le spectateur grâce à d’édifiantes descriptions ou à un style particulier. Dans Au bonheur des dames par exemple, les tissus, les couleurs, les textures et la lumière sont décrits à maintes reprises, si bien et si précisément que le lecteur pourrait presque s’imaginer les toucher et les sentir. De même, dans Une Vie, la présence de belles et longues descriptions, notamment de la froide lande la nuit lorsque Jeanne fugue, laisse l’esprit du lecteur vagabonder. Les Misérables, de Victor Hugo, est également un roman très célèbre pour ses descriptions, par exemple celles qui détaillent les nombreuses rencontres entre Cosette et Jean Valjean. On observe ici que le lecteur peut s’échapper de la réalité en se mettant à la place des personnages ou en les imaginant.
En conclusion, l’art du roman et du théâtre est un mélange de morale et de dénonciation ouvrant les yeux du lecteur ou du spectateur ainsi que de rêve ou de rire permettant au lecteur de s'échapper de la réalité. Une question pourrait être posée, c’est celle de la valeur littéraire : un roman, ou un livre en général, peut-il être considéré comme étant de la « bonne littérature » si son fond n’est pas forcement destiné à faire ouvrir les yeux et si l'auteur se concentre davantage sur la forme ?
Eléonore F., 2nde section internationale, lycée international de Valbonne Sophia-Antipolis, juin 2010.
Devoir de Yolaine P. :
Le réalisme, mouvement littéraire du XIXème siècle dont Hugo et G. de Maupassant furent les hauteurs phares, avaient comme caractéristique de représenter la réalité dans toute sa vérité, sans l’embellir. Aussi, lorsque Rosalie conclut, dans l’excipit d’Une Vie, que « la vie, (…) ça n’est jamais si bon ou si mauvais qu’on croit », on pourrait se demander, dans une optique plus générale,si l’auteur, à travers ses œuvres, quel que soit leur genre, veut nous faire raisonner sur notre propre vie et sur la société qui nous entoure ou bien nous permettre d’y échapper. Nous verrons donc, dans un premier temps, en quoi une pièce de théâtre ou un roman peut ouvrir les yeux du lecteur sur la vie, et, dans un second temps, au contraire, comment ceux-ci permettent d’échapper à la réalité.
L’auteur d’une pièce de théâtre ou d’un roman réaliste veut le plus souvent, à travers son œuvre, représenter la société et en dénonce les défauts. En effet, le genre du roman réaliste dépeint la réalité sans l’embellir et nous montre ainsi bien des injustices sociales. Dans Une Vie de Maupassant, alors fort influencé par Schopenhauer, l’auteur décrit une noblesse en déclin dont chaque personnage est plus ou moins médiocre : Jeanne est soumise à son mari, Julien trompe sa femme,… Cela nous montre bien que le roman réaliste ouvre les yeux du lecteur sur la vie et la société.
A l’instar du roman, le théâtre représente aussi la société et, qui plus est, de hautes classes sociales pour que les spectateurs (souvent nobles, bourgeois ou riches) puissent s’identifier à la pièce et comprendre ainsi son rang dans la hiérarchie sociale. En effet, dans Tartuffe de Molière, Orgon à tout pouvoir sur sa fille (qu’il veut marier à Tartuffe) et sur son fils (qu’il menace de déshériter). Orgon est soumis à Tartuffe, faux dévot représentant alors la religion. Et ce dernier des fait arrêter par l’Exempt, envoyé du Roi, qui montre alors la monarchie sous un jour favorable. Le théâtre nous monte bien comment le lecteur, ou spectateur, peut s’identifier et réfléchir à sa propre vie.
De plus, il y a toujours un message moral que l’auteur veut faire passer au lecteur ou au spectateur, qui dénonce des problèmes sociaux. Tartuffe, personnage éponyme de l’œuvre, est un faux dévot et est l’incarnation même de l’hypocrisie. A travers cela, Molière dénonce les abus qu’on peut faire de la religion en faisant une satire de celle-ci. Dans Germinal de Zola, ce dernier dénonce l’exploitation des ouvriers dans les mines. Une œuvre permet donc, à travers son message, d’ouvrir les yeux du lecteur sur sa vie et de créer une opinion face aux défauts de la société.
Bien qu’une œuvre, romanesque ou théâtrale, permettent d’ouvrir les yeux sur sa vie et la société, elle permet néanmoins, dans certains cas, d’échapper à la réalité. Le théâtre a toujours été un moyen de divertissement littéraire. Le théâtre comique, alors sans grande valeur au XVIIème siècle, était destiné à faire rire les gens du bas peuple par des comiques de gestes et de paroles. Par exemple, dans les Fourberies de Scapin de Molière, Scapin frappe son maître qui est dans un sac. Le comique gestuel traduit par les coups de bâtons faire rire le spectateur. Le divertissement que provoque une œuvre théâtrale permet au spectateur (ou lecteur) de se détendre et d’échapper à la réalité.
De plus, une œuvre littéraire écrite à n’importe quelle époque et dont le succès traverse le temps peut être lue des siècles plus tard par une personne qui ne s’identifie pas au monde et à la société qui y est décrite, tout simplement parce qu’elle ne vit pas à la même époque. Dans le
Dernier jour d’un condamné de Victor Hugo, le problème social de la peine de mort est une thématique de l’œuvre, sans pour autant qu’elle ouvre les yeux du lecteur sur sa vie puisqu’ elle est aujourd’hui interdite (en France en tout cas !). Ces œuvres permettent au lecteur de comprendre une société passée et de fuir le moment présent et donc la réalité.
Enfin, une œuvre peut, par ses aspects imaginaires, fantastiques, permettre au lecteur ou au spectateur d’échapper à la réalité, et, dans le cas du roman fantastique, d’entrer dans un univers différent de la réalité. Comme pièce de théâtre, nous pouvons citer Rhinocéros de Ionesco, appartenant au théâtre de l’absurde, où les personnages se transforment peu à peu en rhinocéros sur la scène (on mettra de côté la visée argumentative et politique de cette transformation). D’autre part, La nuit des temps de Barjavel est un roman fantastique où le lecteur échappe à la réalité dans une histoire irréelle. Dans les deux cas, l’aspect fantastique d’une œuvre permet au lecteur d’échapper à la réalité
Le roman comme la pièce de théâtre sont souvent des manières pour l’auteur d’exposer ses pensées sur une société et d’en exposer les défauts, permettant ainsi au lecteur ou au spectateur de réfléchir sur sa propre vie et la société. Mais ils peuvent aussi aider ce dernier à échapper à la réalité par leurs aspects irréels ou fantastiques. On remarque que dans notre société actuelle, la télévision et le cinéma ont peu à peu remplacés le théâtre, et qu’ils sont plutôt des moyens d’échapper à la réalité (par des films, au cinéma : univers clos, films en 3D, sonorisation…). Cependant, ils peuvent aussi être vecteurs de messages sociaux qui peuvent nous concerner, nous, notre vie et la société qui nous entoure.
Yolaine P., 2nde section internationale, lycée international de Valbonne Sophia-Antipolis, juin 2010.
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