Complexe, Christophe Marmorat, la cathédrale amoureuse
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Complexe, la cathédrale amoureuse, Christophe Marmorat
Au préalable : Afin d’éviter l’amertume, le regret où la remise en question, je vous recommande de considérer ce texte comme émanant d’un auteur éternellement immature et utopique vivant dans une aisance matérielle et un confort intellectuel qui le situe très loin des réalités de l’existence.
En lisant la préface des « Mirages de l’amour » de Xavier Lacrois, je suis surpris qu’un théologien concentre sa réflexion sur l’amour altérité, quid de l’amour ego et de l’amour transcendant ?
C’est l’amour cathédral, la cathédrale amoureuse qui repose sur l’amour ego, l’amour de soi, cet amour qui fait face à l’amour altérité, c’est à dire l’amour de l’autre, l’amour de soi et l’amour de l’autre tendant, plus ou moins consciemment, vers l’amour du bon, du bien, du beau, de la Nature et, ou d’un Dieu, c’est l’amour transcendant.
Comment donner du fruit si l’être n’est pas fertile ?
Si l’altérité suppose l’existence de deux êtres, ne s’agit il que de deux êtres de chair et puis d’os ?
Si le nous fait sens,de quoi est-il constituer, de quelle « addition » ?
Certes l’amour transforme, ce nous produit deux nouveaux je.
Ce nous existence, incarnation de l’amour transforme nécessairement les deux êtres engagés, partis de ce nous.
L’amour altérité est bien le cœur, le centre de la relation amoureuse, mais.
Mais l’amour égo me semble premier, l’amour de soi.
Comment s’inscrire dans une belle relation, dans une belle rencontre si celle-ci s’inscrit d’abord dans le cadre d’un besoin - réciproque ou non - d’affection, dans un lien de dépendance.
Dans un lien de dépendance - plus ou moins prégnant - né d’un défaut premier de construction de la personnalité de l’être majeur, né d’une perte d’intégrité, de renoncements, de blessures non pansées.
D’un lien de dépendance né de l’absence ou de la non complétude du nécessaire travail sur soi de l’être, de l’être devant s’accoucher de lui-même afin de briser les liens, ce travail qui lui permet de s’affirmer en pleine liberté, de poser en pleine responsabilité les actes de sa vie.
Ce travail d’accouchement qui donne à l’être la fierté d’exister en lui et pour lui-même en tant que personne humaine dans toute son originalité, un être qui ose aller au bout de son identité.
Comment vivre en une pleine liberté et dans une offrande réciproque une relation amoureuse s’inscrivant dans un lien de dépendance, dans un une dépendance qui trouble le discernement, la nécessaire clairvoyance qu’appelle toute relation humaine.
Dans un lien de dépendance qui risque de pervertir, d’abimer plus ou moins le sentiment amoureux, la dépendance altère l’amour altérité.
Puisque l’amour est l’acte suprême de liberté et pour pouvoir exercer pleinement cette liberté, il convient d’accorder une place précieuse à l’amour ego, à l’amour de soi.
Il est d’ailleurs dommage que l’Eglise catholique mette tellement l’accent sur le « aimer vous les uns les autres » et fort peu sur « je vous ai fait à mon image ».
Peut être dans un souci d’ascendant de l’Eglise sur ses fidèles, une crainte de perdre un certain contrôle des âmes et aussi parce que l’Eglise s’est retrouvée bien des fois comme la religion officielle d’un Etat ou d’un Royaume, il lui a été difficile de promouvoir, de porter totalement et à tout instant de son histoire cette place privilégiée qu’occupe l’homme dans le message que nous délivre le Christ.
Il ne faut pas, bien entendu, oublier la contribution pluriséculaire de l’Eglise à la formation, à l’éducation et au développement personnel des individus.
Quoiqu’il en soit il me semble que nous négligeons l’amour de soi.
A cet égard, l’image que nos sociétés portent sur la démarche thérapeutique d’ordre psychologique (psychothérapie, psychanalyse) est symptomatique de notre malaise à l’amour de soi.
Cette démarche semble honteuse, c’est un signe de faiblesse, il faut la cacher.
Et peut-être que cette image s’explique en partie par l’inconfort pouvant exister sur ce sujet chez eux qui ne l’ont pas éprouvée.
Tout bien considéré n’est ce pas une démarche particulièrement courageuse, que l’on sait douloureuse, que de se confronter à ses blessures profondes, que de parvenir à regarder autrement les êtres qui nous sont les plus chers : parents, frère et sœur, à les mettre à leur bonne place à les nommer pour permettre notre propre accouchement ?
N’est il pas plus confortable - bien que pervers - de considérer comme honteux et comme un acte de faiblesse ce qui, pour moi, résonne comme un acte chevaleresque et de bel fierté ?
Dans un excès d’irréalisme, je me suis toujours interrogé pourquoi ce genre démarche ne figurait pas sur un cv au coté des loisirs ?
Comme si la connaissance des gouts d’un futur salarié pour le théâtre, la photographie où le cinéma pouvait plus renseigner l’employeur sur la personnalité que le salarié allait engager dans ses prochaines fonction que le fait d’avoir où non réalisé une telle démarche.
Bien entendu ce propos est excessif et je ne souhaiterai pas que cette idée soit mise en œuvre, je la pose uniquement comme objet de réflexion, rien de plus.
Nous avons évoqué l’amour altérité et l’amour ego, pour constituer une belle cathédrale amoureuse équilibrée, reste à traiter de l’amour transcendant.
Un amour altérité, « tomber » amoureux de l’autre est une source de déséquilibre qui se compense par l’amour de soi.
Mais un amour de soi trop vif affecte nécessairement la qualité voire l’existence de l’amour altérité.
C’est pourquoi il importe tant que l’amour altérité et que l’amour que chaque membre d’un couple se porte à lui-même soient vécus dans l’amour transcendant, sous la « protection » de cet amour transcendant.
L’amour transcendant c’est la fameuse phrase d’Antoine de Saint Exupéry où il nous confie que l’amour c’est regarder ensemble dans la même direction.
Au sens premier, ce peut-être regarder un paysage comme témoignage de l’amour de la nature, la nature regardé comme une éternelle illustration de beauté, nous apportant une conscience d’un beau qui nous dépasse,qui mérite le respecte et qui nous donne envie de l’approcher dans nos vies, dans nos manières de vivre.
L’amour transcendant, c’est aussi la conscience individuelle et du couple de l’existence de valeurs, d’une morale et plus encore de l’existence d’un Dieu ou de toutes croyances fortes et supérieures qui vont guider, orienter nos vies.
Finalement la cathédrale amoureuse, considéré dans un absolu, une sorte de modèle, de référence, repose sur deux individus libres, intègres, pleinement eux-mêmes en tant que personne originale et unique, qui librement et individuellement reconnaissent l’existence d’éléments transcendantaux et qui partage un sentiment amoureux réciproque vécu également dans le respect de valeurs qui les transcendent, les guident et les portent vers le meilleur d’eux-mêmes.
Bruxelles, le samedi 7 août 2010
Un texte extrait de mon livre "Complexe", qui a fait l'objet d'une conférence-débat devant deux classes de philo dans un lycée à Caen au printemps 2011.
Date de dernière mise à jour : 31/10/2018