le prologue,Antigone,Anouilh
Anouilh, Antigone, le prologue, questionnaire pour l'oral bac
- Le 14/08/2013
- Dans Les oraux de français
Questionnaire EAF, séquence théâtre
le prologue d’Antigone de Jean Anouilh
jean Anouilh, Antigone
texte
Créon. – Marie-toi vite, Antigone, sois heureuse. La vie n’est pas ce que tu crois. […]
Antigone. – Quel sera-t-il, mon bonheur ? Quelle femme heureuse deviendra-t-elle, la petite Antigone ? Quelles pauvretés faudra-t-il qu’elle fasse elle aussi, jour par jour, pour arracher avec ses dents son petit lambeau1 de bonheur ? Dites, à qui devra-t-elle mentir, à qui sourire, à qui se vendre ? Qui devra-t-elle laisser mourir en détournant le regard ?
Créon, hausse les épaules. – Tu es folle, tais-toi.
Antigone. – Non, je ne me tairai pas ! Je veux savoir comment je m’y prendrai, moi aussi, pour être heureuse. Tout de suite, puisque c’est tout de suite qu’il faut choisir. Vous dites que c’est si beau la vie. Je veux savoir comment je m’y prendrai pour vivre.
Créon. – Tu aimes Hémon ?
Antigone. – Oui, j’aime Hémon. J’aime un Hémon dur et jeune ; un Hémon exigeant et fidèle, comme moi. Mais si votre vie, votre bonheur doivent passer sur lui avec leur usure, si Hémon ne doit plus pâlir quand je pâlis, s’il ne doit plus me croire morte quand je suis en retard de cinq minutes, s’il ne doit plus se sentir seul au monde et me détester quand je ris sans qu’il sache pourquoi, s’il doit devenir près de moi le monsieur Hémon, s’il doit apprendre à dire « oui », lui aussi, alors je n’aime plus Hémon !
Créon. – Tu ne sais plus ce que tu dis. Tais-toi.
Antigone. – Si, je sais ce que je dis, mais c’est vous qui ne m’entendez plus. Je vous parle de trop loin maintenant, d’un royaume où vous ne pouvez plus entrer, avec vos rides, votre sagesse, votre ventre. (Elle rit). Ah ! je ris, Créon, je ris parce que je te vois à quinze ans, tout d’un coup ! C’est le même air d’impuissance et de croire qu’on peut tout. La vie t’a seulement ajouté tous ces petits plis sur le visage et cette graisse autour de toi.
Créon, la secoue. – Te tairas-tu, enfin ?
Antigone. – Pourquoi veux-tu me faire taire ? Parce que tu sais que j’ai raison ? Tu crois que je ne lis pas dans les yeux que tu le sais ? Tu sais que j’ai raison, mais tu ne l’avoueras jamais parce que tu es en train de défendre ton bonheur en ce moment comme un os.
Créon. – Le tien et le mien, oui, imbécile !
Antigone. – Vous me dégoûtez tous avec votre bonheur ! Avec votre vie qu’il faut aimer coûte que coûte. On dirait des chiens qui lèchent tout ce qu’ils trouvent. Et cette petite chance pour tous les jours, si on n’est pas trop exigeant. Moi, je veux tout, tout de suite, – et que ce soit entier – ou alors je refuse ! Je ne veux pas être modeste, moi, et me contenter d’un petit morceau si j’ai été bien sage. Je veux être sûre de tout aujourd’hui et que cela soit aussi beau que quand j’étais petite – ou mourir.
Commentaire
Problématique :
En quoi la question du bonheur prend t‘elle ici une dimension tragique ?
Plan possible pour un commentaire
- I) Deux personnages opposés
- 1) Créon
- 2) Antigone
- II) Le bonheur et son refus
- 1) Le bonheur selon Créon
- . 2)Antigone le refus du bonheur
- III) Une progression tragique
- 1) L’inversion du rapport de force
- 2) La dimension tragique
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Date de dernière mise à jour : 29/07/2021